"A bientôt parents chéris! Confiance, je laisse ici ce cahier pour n'emporter qu'un petit carnet... ce cahier est à vous, je l'ai écrit pensant à vous et je vous le remettrai bientôt.
J'ai juré de revenir, je reviendrai, si Dieu le permet"
Tels sont les derniers mots laissés par Raymond Maufrais le 13 janvier 1950. Ce cahier sera découvert quelques semaines plus tard, sur les bords du fleuve Tamouri, à l'emplacement du dernier camp du jeune Français. Jamais on ne retrouvera Raymond Maufrais, malgré les nombreuses recherches menées par son père dans la forêt guyanaise.
Initialement, ces notes prises au jour le jour, le plus souvent le soir à l'abri de la moustiquaire, n'étaient pas destinées à être publiées. Elles devaient servir de base à un livre que le jeune homme comptait rédiger à son retour en France. L'histoire en a décidé autrement.
Ce livre, déjà paru en 1970, m'a passionné. On y découvre le parcours d'un homme que rien ne fera dévier de sa trajectoire: il a un but, établir la jonction Guyane-Brésil par le fleuve Jari, seul et à pied, et c'est ce qui le hante.
Il part avec ses certitudes et son envie de réussir et de montrer aux sceptiques que son rêve est réalisable.
" L'aventure, c'est le travail, et plus le travail est difficile, plus l'aventure est belle" affirme-t'il au départ.
Mais bien vite, les difficultés commencent et l'exaltation des premiers jours fait vite place au doute, puis au cafard (mot qui revient à maintes reprises dans le récit).
Pourtant, il tient bon et ne renoncera jamais, même aux pires moments.
"Je tiendrai bon parce que je veux vivre"
Au fil des jours, des semaines, le jeune homme subit un lent mais terrible épuisement physique et morale.
"J'avais tout imaginé pour ce raid hors la chute du moral: j'avais une confiance exagérée en moi, je me croyais plus fort"
Pourtant, malgré la faim, la soif, les blessures, Raymond Maufrais teint bon. Avec pour seule compagnie son chien Boby, son appareil photo et son fidèle carnet de notes, il s'enfonce plus avant dans la forêt hostile.
"
Pour rien au monde je n'abandonnerai. je tiendrai pour sûr, il faut tenir, mais vivement trouver sur ma piste des Indiens, même ceux que l'on dit sauvages. Qu'importe leur accueil, voir des hommes, sentir la forêt habitée, moins hostile"
Mais le jeune homme demeure lucide et écrire tous les jours lui est devenu une nécessité:
"S'abandonner à écrire longuement amène un bien-être inouï. J'éprouve un certain plaisir à raisonner, à analyser mes sentiments car ainsi je recrouve ma lucidité et combats intérieurement le cafard en en recherchant les raisons."
Hélas, le 13 janvier 1950, on perd la trace du jeune Français qui disparait à jamais!
Un homme de 23 ans, au courage extraordinaire, à la force de caractère phénoménale est allé au bout de ses rêves et y a laissé la vie. jamais il ne s'est résigné, luttant jusqu'à l'extrème limite de ses forces. Raymond Maufrais nous laisse un témoignage poignant et authentique, une véritable leçon de courage et de ténacité.
"Ce sera soit l'échec, c'est-à-dire : la mort, soit la réussite. Pas de demi-mesure!"
j'ai adoré ce livre et j'avais vraiment envie de vous en parler et, peut-être de vous donner envie de le découvrir, bien que, sans aucun doute, vous êtes déjà nombreux à l'avoir lu!